Le mouvement communaliste marseillais est encore assez méconnu. Le
souvenir qui parvient à subsister dans les classes populaires est
fragmentaire, les animateurs de ces évènements presque tous oubliés
hormis Gaston Crémieux. Son destin tragique a fini par symboliser
presque à lui seul le drame de la Commune marseillaise et effacer
l’importance des autres acteurs, pourtant restés dans les mémoires
pendant des décennies jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.
Par ailleurs, l’histoire de la Commune de Marseille souffre encore de la
vision qu’en ont la plupart des historiens dont la grille de lecture se
calque sur les péripéties et les caractéristiques de sa grande sœur (en
réalité puînée), la Commune de Paris, déjà elle aussi trop souvent mal
comprise. Les idéologies antagonistes ont filtré son histoire et figé
les visions parfois jusqu’à la caricature. Pour trop de gens, les
mouvements communalistes apparaissent comme des jacqueries violentes et
désordonnées alors qu’au contraire elles ont été des tentatives non
seulement de prise de pouvoir par le peuple mais de gestion organisée de
ce même pouvoir par celui-ci. Et leur rapport avec la renaissance de
République a été souvent occulté alors même que les communards ne
cessaient de s’en réclamer. Et pour cause : la défense et la définition
de ce que devait être (ou ne pas être) la République fut l’enjeu vital
de cette guerre civile qui concerna la France entière.
Le réexamen des documents d’archive aujourd’hui plus facilement
accessibles permet de présenter l’enchainement des évènements du
Marseille des années 1870-1871 de façon plus réaliste, leur donne une
cohérence et ouvre de nouvelles pistes de recherche.
Chantal Champet est membre de l’ALPMR13 (Association laïque pour la
mémoire républicaine dans les Bouches-du-Rhône). Professeur retraitée
d’histoire-géographie du secteur public, elle collabore avec diverses
associations pour l’émergence d’une histoire populaire des Marseillais,
c’est-à-dire de l’Histoire de la population marseillaise : comment les
humbles, les petits, les sans-voix ont vécu les grands traumatismes
historiques. Et lorsqu’on considère ces derniers de leur point de vue ,
bien des choses apparaissent... Actuellement elle est en train d’écrire
une biographie d’Alphonse Esquiros, figure rattachée au souvenir de la
Commune de Marseille, très aimé de la classe ouvrière bucco-rhodanienne
de son époque.
La Commune de Marseille et la République du 4 septembre (1870-1871) par Chantal Champet. Groupe Louise Michel de la Libre Pensée de Marseille, 2021. 27 pages.